Après presque trente-trois ans, les retrouvailles entre Mercure et une sonde de l'agence spatiale américaine accoucheront d'images de vastes régions encore jamais vues auparavant.
Le directeur de la mission, Sean Solomon, confie : "l'excitation est palpable dans l'équipe scientifique ; nous sommes sur le point de récolter les premiers clichés en gros plan de Mercure après plus de trois décennies, et une assistance gravitationnelle réussie va envoyer MESSENGER sur la trajectoire nécessaire pour le mettre en orbite autour du plus proche compagnon du Soleil, ce qui est une première"
Pendant le survol, les instruments de la sonde réaliseront les premières observations rapprochées de la planète depuis le troisième et dernier survol de Mercure par Mariner 10 le 16 mars 1975. Les données recueillies sont essentielles car elles déterminent déjà le déroulement futur de la mission, une fois la sonde satellisée. Les sept instruments de MESSENGER commenceront à remplir les objectifs de la mission, qui sont :
- Cartographier la composition chimique et minéralogique de la surface mercurienne ;
- Photographier la planète en entier avec une résolution de quelques centaines de mètres, ou meilleure ;
- Déterminer la structure du champ magnétique mercurien ;
- Mesurer le champ gravitationnel de la planète ;
- Caractériser les particules neutres de l'exosphère et les ions/électrons de la magnétosphère.
Les appareils photographiques prendront plus de 1200 images de Mercure de l'approche au départ, en passant par le survol proprement dit. "Les survols de Mariner 10 pendant les années 1970 ne lui ont permis de voir qu'un seul hémisphère, soit un peu moins de la moitié de la planète. Lors de ce survol, nous entamerons la photographie de l'hémisphère encore jamais vu par aucune sonde spatiale, et avec un niveau de détails directement comparable, sinon meilleur que celui de Mariner 10. De plus, l'utilisation d'un éventail de filtres colorés nous donnera une première idée de la composition de la surface mercurienne." explique Louise Prockter, scientifique en charge de l'imagerie.
Un site qui attire tout particulièrement l'attention est le bassin d'impact Caloris, qui représente avec son diamètre d'environ 1300 kilomètres une des plus grandes structures d'impact de tout le Système Solaire. L. Prockter poursuit : "Caloris est énorme, près d'un quart du diamètre de Mercure, avec des anneaux montagneux culminant à trois mille mètres d'altitude. Mariner 10 en a vu le tiers, mais nous allons enfin le découvrir en entier ! Les bassins d'impacts agissent comme des foreuses géantes, soulevant du matériau souterrain et le répandant aux alentours du cratère. En le regardant dans différentes couleurs, nous commencerons à comprendre quelle peut être la composition du bassin Caloris et apprendre quelque chose à propos du sous-sol mercurien."
Mariner 10 était incapable de déterminer la composition chimique et minéralogique de la surface de Mercure, aussi les instruments de MESSENGER fourniront des données de très grande valeur. Les spectromètres visible/proche infrarouge et visible/ultraviolet vont établir le spectre de la réflectivité de la surface, ce qui révélera la présence d'espèces minérales importantes. La spectrométrie gamma, X et neutronique dévoilera quant à eux la composition chimique générale.
Des mesures Doppler lèveront un coin du voile du champ de gravité de Mercure : elles contribueront à nous informer sur la structure interne de la planète, et plus spécialement sur la taille de son noyau.
Une rencontre de ce genre est une chance d'examiner l'environnement de Mercure d'une manière impossible si l'on est en orbite. Le survol sera l'occasion de prendre des mesures du champ magnétique à basse altitude et près de l'équateur : elles complèteront celles effectuées plus tard, pendant la phase orbitale de la mission.
MESSENGER débutera à la fois la cartographie de l'exosphère grâce à des observations en ultraviolet et le sondage de la population des particules énergétiques et du plasma piégés dans la magnétosphère mercurienne. En outre, la trajectoire empruntée pour le survol permettra à la sonde de recueillir des données sur la queue magnétique de Mercure, ce qui deviendra impossible une fois qu'elle sera en orbite.
MESSENGER a accompli la moitié de sa croisière vers Mercure, longue de 7,9 milliards de kilomètres et comportant une quinzaine de tours autour du Soleil. L'engin a déjà survolé la Terre une fois (le 2 août 2005) et Vénus à deux reprises (les 24 octobre 2006 et 5 juin 2007). Trois passages à proximité de Mercure (en janvier et octobre 2008, puis en septembre 2009) vont exploiter la gravité de la planète pour qu'une satellisation soit possible lorsque MESSENGER croisera Mercure pour la quatrième fois, en mars 2011.
“La complexité de cette mission, avec ses nombreux survols et sa multitude de manoeuvres, requiert une attention fine et constante. MESSENGER est guidé par une équipe d'ingénieurs et de scientifiques éminemment talentueux et dévoués, pleinement engagés et excités par les découvertes qu'ils vont faire" conclut Peter Bedini, le superviseur des opérations.