Au mois de décembre 2005, Cassini surprenait Encelade en train d’éjecter depuis son pôle sud des panaches de glace et de vapeur d’eau, et découvrait par la même occasion que cette lune alimentait en particules et en cristaux l’anneau E de Saturne.
Mais comment un astre de seulement 500 kilomètres de diamètre, aussi froid, peut-il héberger une activité géologique si intense ? Et pourquoi cette activité se cantonne-t-elle précisément à son pôle sud ? Selon une équipe de chercheurs, qui publie aujourd’hui leurs travaux dans la revue Nature, une bulle de matière chaude et peu dense située dans l’hémisphère sud - mais non au pôle - aurait pu remonter vers la surface, faire littéralement basculer Encelade, puis se retrouver au pôle sud !
Il est à présent établi qu’Encelade éjecte des panaches de glace à plus de 500 kilomètres d’altitude, et des scientifiques avancent même que le sous-sol de son pôle sud - où les températures sont de 10 à 15 degrés supérieures à celles mesurées sur le reste de la surface - pourrait accueillir des poches d’eau liquide. Depuis ces découvertes, les astronomes se demandent pourquoi ce "point chaud" et le cryovolcanisme sont centrés au niveau de cette région polaire, et non en un autre lieu d’Encelade. Pour percer ce mystère, Francis Nimmo de l’université californienne de Santa Cruz et Robert Pappalardo du JPL se sont posé la question suivante : A l’origine le "point chaud" aurait-il pu se trouver ailleurs qu’au pôle, pour ensuite y migrer ?
Les calculs menés par les chercheurs permettent de répondre par l’affirmative. La configuration la plus stable pour un corps en rotation comme Encelade ou une planète est celle où sa masse est concentrée à l’équateur. Aussi, toute modification dans la distribution est susceptible d’induire un rééquilibrage, visant à faire migrer les régions très denses vers l’équateur, et les moins denses vers les pôles.
En considérant qu’Encelade ait présenté au cours de son histoire une « bulle » de matière chaude et peu dense sous la surface de son hémisphère sud, située dans la couche de glace ou dans le noyau rocheux, bulle qui serait ensuite remontée vers la surface, la lune aurait pu basculer sur elle-même pour se rééquilibrer, et la bulle se retrouver au pôle sud.
Selon les chercheurs, Cassini devrait être en mesure de vérifier la validité de cette hypothèse. En effet, la présence d’une telle bulle de matière peu dense devrait être trahie par une anomalie dans le champ gravitationnel d’Encelade. Une nouvelle fois, c’est la sonde Cassini qui devrait fournir les réponses à ces questions…